Extrait d'un dialogue avec Roy

 

Roy Hart jouant 'Biodrame' par Serge Béhar, Paris 1972

 

Le 27 avril 1975, Roy a invité Paul à déjeuner avec lui. C'était à Malérargues pendant des répétitions intenses de l'Economiste. Trois semaines plus tard Roy est décédé dans un accident de voiture près de Nice. Pour une raison inconnue, Roy a demandé à Paul d'enregistrer leur dialogue pendant le repas. Auparavant, il n'avait jamais proposé un tel acte. Voici un extrait de ce dialogue :

 

" J'ai quitté RADA (l'Académie Royale d'Art Dramatique) pour quitter cette structure qui disait "Etudiant boursier Roy Hart : acteur", j'ai quitté cela pour retourner dans le monde du non-art, le monde des humains, car je ne pouvais pas supporter cette coupure entre l'art et l'humanité. Mais bien sûr, je ne l'ai jamais quittée du tout. J'étais resté dans cette coupure jusqu'à ce que j'ai été capable de combler le fossé entre les deux. J'avais provoqué, j'avais évoqué chez tous ceux que je rencontrais l'idée que le développement de l'étendue vocale n'est pas un but en soi, mais un moyen vers un but qui est le développement de la personnalité. En d'autres termes, j'ai semé les graines d'un besoin, le besoin d'exprimer votre potentiel. Le besoin de découvrir que vous êtes bien plus que ce que vous croyez être. On ne peut pas atteindre ce niveau sans un risque terrible d'inflation de l'ego. C'est pourquoi j'ai toujours évoqué l'idée qu'on naît artiste, qu'on ne le devient pas, quand cela me convient. En d'autres termes, quand je sens que quelqu'un s'est à l'évidence stupidement enflé, je suis forcé de lui dire " Regarde, retourne d'où tu viens !" ou bien "Qu'est-ce que tu penses que tu fais ici ? " ou quelque chose de ce genre. Mais je ne crois pas à ça. Je le dis seulement quand je vois que la personne concernée n'est pas suffisamment humble pour reconnaître que, bien qu'il ait été écrit que chaque être humain possède une âme, (ce qui signifie que chaque être humain est capable d'être quelque chose, d'être quelqu'un) le cerveau, la part non-humble de la personne, est si affreusement stupide qu'il croit pouvoir, par son seul désir, guérir cette fissure entre l'art et l'humanité. "

 

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